Un roman culte. Si l’expression est souvent galvaudée, elle s’applique parfaitement au Hussard bleu, de Roger Nimier (1925-1962). Tout d’abord parce que le titre du roman donna naissance à une famille littéraire. L’appellation est créée par Bernard Frank en décembre 1952 avec un article paru dans Les Temps modernes de Sartre : «Grognards & Hussards». Frank épingle une escouade d’écrivains – parmi lesquels Roger Nimier, Antoine Blondin et Jacques Laurent – qui, dans un après-guerre dominé par la figure de l’intellectuel sartro-camusien, prônent une littérature désengagée tout en réhabilitant certains aînés (Morand, Chardonne, Giono, Céline, Fraigneau, Montherlant…) ayant eu des ennuis à la Libération. Il pourfend ces jeunes romanciers que, «par commodité», il se propose de nommer «fascistes». Une nouvelle génération d’écrivains réfractaires aux bons sentiments et au confort intellectuel existentialiste naît donc. Le label «hussard» sera un succès.
Les hussards enfilent la panoplie qu’on leur tend. Ils s’élèvent dans des revus et des journaux contre le roman à thèse, les pions, les professeurs, les intellectuels, les censeurs, pour célébrer les joies de la vie et de l’amour, la légèreté, la désinvolture, l’insolence, l’amitié…