Une photographie peut-elle avoir une âme ? Je regarde cette photo un nombre incalculable de fois chaque jour. C’est mon fond d’écran de smartphone depuis quelques mois.

Par: Laila Mourad

Cette photo me regarde. Je la regarde à nouveau…

Instant capturé en juin 2022, aux puces du canal à Lyon, en France. Un instant qui aurait pu être capturé ailleurs.

Pourquoi pas au Liban, à l’entrée du souk de Saida, devant l’échoppe de falafels d’Abou Rami. On dira que c’est du Pepsi dans le verre. Derrière sa charette, le vendeur de fruits et légumes découpe la pastèque XXL en criant le prix au kilo et me tend un morceau. Un autre morceau pour mon père. Juteuse, savoureuse, sans égale.

Pourquoi pas à Zahle, dans la plaine de la Bekaa, au Liban. Dans la cour derrière son restaurant, Simon le propriétaire finit de déjeuner sur le pouce avec son associé, avant d’aller donner son premier cours de tennis de l’après-midi aux enfants terribles (mon frère Fouad et moi).

Pourquoi pas à Paris, en plein mois d’août, on y étouffe. La pastèque du Monoprix n’a pas de goût, mais nous désaltère. Yallah une dernière clope et on retourne bosser. En télétravail bien sûr. C’est encore la grève ! Plus de RER, plus de métro.

“Vivement les vacances au Liban !”
Plus d’électricité, plus d’eau, plus de feux tricolores, plus de ramassage des ordures, plus d’argent dans les banques, plus de viande, plus d’État.

Les grèves continuent en France.
Le Liban continue sa descente aux enfers.
Et cette pastèque dévorée.
Paix à son âme.

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