La rue Soufflot
(Romance)
Notre petite journée sera bientôt finie : les dernières
Années s’ouvrent devant nous comme ces rues ;
Et le collège est toujours là, et cette place
Quadrillée, et la vieille église où nous avons vu
Entrer Verlaine mort. Au fond, malgré la mer
Et tant de courses, nous ne sommes jamais sorti
D’ici, et toute notre vie aura été
Un petit voyage en rond et en zigzag dans Paris,
Et même après, nous resterons encore ici,
Invisible, oublié, mais habitant toujours
La ville de l’enfance et du premier amour,
Avec l’étonnement des douze ans et de la rencontre,
Qui nous fait murmurer encore dans la foule :
“Porque sabes que siempre te he querido…”
Et un passant qui m’a entendu, se retourne.
(Œuvres, Bibliothèque de la Pléiade, 1957)
Illustration par notre correspondant à Paris
M.Sylvain Fourcassié